Abdelhak Najib a été sacré homme de Culture 2020, par la prestigieuse Union arabe pour la Culture. Un hommage rendu au travail assidu d’un. Homme de culture qui a milité durant cette année 2020 pour contrecarrer les effets néfastes de la pandémie du Covid par la culture et son rayonnement. Entretien.
Propos recueillis par
Mounir Serhani
Écrivain-universitaire
Vous êtes distingué par un prix très convoité dans le monde arabe depuis son lancement, quel est votre sentiment ?
C’est un immense honneur d’être distingué par une aussi prestigieuse institution qui couvre tout le Monde Arabe, sans oublier tous les hommes de culture de la diaspora arabe dans le monde. Ce prix vient couronner une année très riche pour moi-même et pour les Éditions Orion que j’ai fondée il y a trois ans. Mon point de vue face à la crise planétaire était clair : produire le maximum de livres, donner le maximum de conférences, multiplier les actions pour montrer que quand le monde va très mal, seule la culture peut encore nous servir de rempart contre toutes les dérives. C’est en somme cela que l’Union arabe pour la Culture a distingué cette année.
En effet, cette distinction vient saluer le travail d’un homme de Lettres et une figure de la Culture marocaine et arabe qui s’est distingué durant cette année non seulement en tant qu’écrivain en publiant plusieurs ouvrages importants mais aussi l’éditeur, qui malgré la grande crise a continué son travail de militant.
Je pense que face à des chocs aussi forts que la pandémie du Covid 19, nous sommes obligés de trouver des moyens de résistance. Le mien a été tout simple. D’abord écrire sur la crise et sur notre futur humain. C’est ce qu’on a fait avec des ouvrages profonds tels que «Maroc, de quoi avons-peur», un livre collectif réunissant 54 auteurs de différents horizons qui pose la question de quel Maroc voulons-nous pour le futur. Nous avons également co-signé avec l’excellent Docteur Imane Kendili, psychiatre et addictologue mondialement connue, une profonde réflexion sur la pandémie du Covid 19 et le monde qui nous attend demain, intitulée: «Coronavirus, la fin d’un monde». Ce dernier ouvrage a été publié en plein confinement pour servir de piste de réflexion sur notre monde finissant, un monde aux multiples tares, qui s’effondre à plusieurs niveaux et le monde qui sera le nôtre demain, suite aux changements radicaux que nous impose cette pandémie planétaire.
Vous avez aussi tenu à faire de cette année, celle du foisonnement littéraire pour tenir et militer face à la crise.
C’est exactement dans cette optique qu’en tant qu’éditeur, fondateur des Éditions Orion, j’ai tenu à publier de nombreux livres, par militantisme, pour dire que notre salut réside dans la culture. J’ai donc publié : «Vitriol», «Finis Gloriae Mundi», «Le pays où les pierres parlent», «Le printemps des feuilles qui tombent», «Le temps des femmes libres», «Schizophrénies marocaines» et «La rédemption par le péché», un essai philosophique co-signé avec l’écrivain et philosophe, Mounir Serhani. Je pense que c’est pour rendre hommage à ce travail de fond durant une période très difficile que l’Union arabe pour la Culture a distingué toutes ces initiatives. Car, il ne faut pas oublier que durant cette année 2020, les Éditions Orion ont publié de nombreux auteurs de belle facture tels que Abdallah El Amrani et son roman : «L’homme qui tua la lune», Noureddine Bousfiha et son «L’autre côté de soi», Najib Bensbia et son roman «Lettre à mon homme», Professeur Wiam El Khattabi et son excellent ouvrage, «Ingratitude Ô travail», «La révolte des secrets» de l’incomparable Rachida Belkacem. Sans oublier, «Leila au pays des benzo» de Linda Chiouar, «Amours» de Mouad Moutawakil, «La danse sur les clous» de Driss Korchi ou encore «La naturopathie du cancer» de Docteur Fati Hamzy. Il faut aussi souligner que tous ces livres ont été rehaussés par la vision artistique de la plasticienne Nadia Chellaoui, une manière de réunir plusieurs acteurs culturels autour d’un objectif commun, celui de résister par les Arts.
Vous avez aussi lancé une opération inédite qui consiste à offrir les œuvres éditées par Orion à tous les lecteurs, et ce, gratuitement.
Tout à fait. Comme vous pouvez le constater, ce sont là plus d’une vingtaine d’ouvrages publiés uniquement en 2020, par temps de crise, et dont effectivement, des centaines d’exemplaires ont été gratuitement offerts à tous les lecteurs désireux de se les procurer dans un geste citoyen pour soutenir les gens durant les difficiles périodes de confinement. L’opération a eu un immense succès et des lecteurs ont pu recevoir leurs exemplaires partout au Maroc, dans des zones très reculées du Sahara, dans les douars isolés des montagnes marocaines…Cela nous a permis de réagir de manière concrète face à la pandémie et d’apporter notre soutien aux autres, ici au Maroc, et ailleurs, un peu partout dans le monde, avec nos publications. L’effet a été immédiat et nous allons récidiver en 2021 pour montrer que la culture est la solution quand tout tombe en ruines.
Le prix distingue aussi Abdelhak Najib le conférencier.
Oui. Absolument. Durant la période du confinement, nous avons organisé de nombreuses conférences via la chaîne Web Orion TV pour soulever des débats de société responsables. Les conférences ont connu un immense succès public avec des thématiques à la fois actuelles et citoyennes posant de profondes questions sur le vivre-ensemble, la solidarité, la cohésion sociale et la culture des valeurs humaines les plus fondamentales. Des dizaines de milliers de personnes ont pu interagir et donner leurs points de vue. C’est notre plus grande satisfaction de voir des gens de partout dans le monde prendre part à nos débats en apportant leurs éclairages. La culture ne connaît aucune frontière. C’est là sa plus grande force. C’est pour cela que c’est elle seule qui résiste quand tout s’effondre.