Conférence de presse du mardi 26 novembre 2019 Au Hyatt Regency de Casablanca

Mot de Giovanna Barberis Représentante de l’UNICEF

Mesdames et messieurs

Que pouvons-nous dire après les images fortes que nous venons de voir ? Ce sont des images qui nous rappellent qu’au moment où tenons cette conférence de presse, des enfants innocents sont privés de leur enfance et subissent des traitements injustes. Cette année le monde célèbre le 30ème anniversaire de la convention des droits de l’enfant. Chaque Etat qui a ratifié cette convention a pris l’engagement, vis-à-vis de tous les enfants sur son sol, de défendre et protéger leur intérêt supérieur

L’UNICEF reconnait les efforts et les progrès consentis par le Royaume du Maroc pour l’éradication du travail des enfants, qui ont permis d’adopter le code du travail en 2005 qui organise l’admission à l’emploi à 15 ans et interdit l’emploi des jeunes de moins de 18 ans dans les travaux dangereux. La loi sur la lutte contre la traite condamne les formes de travail forcé des petites filles, y compris le travail domestique

Trois décennies après l’adoption de la convention des droits de l’enfant, des filles sont toujours privées de leurs droits. Leur recrutement en tant qu’employées domestiques est une grave violation de leurs droits

Le Comité des Droits de l’Enfant à Genève et à l’occasion de l’examen, en Septembre 2014, du rapport périodique du Maroc sur la mise en œuvre de la Convention des droits de l’enfant, avait noté avec préoccupation le recrutement des filles âgées de moins de 18 ans dans le travail domestique. Le Comité avait sollicité le Maroc pour veiller à ce que les lois qui interdisent l’emploi des enfants âgés de moins de 15 ans et les formes dangereuses de travail des enfants âgés de moins de 18 ans, y compris le travail domestique, soient effectivement appliquées et que les personnes qui exploitent les enfants soient dûment sanctionnées

L’UNICEF continue à exprimer aujourd’hui ses réserves concernant la loi relative au travail domestique et rappelle son plaidoyer pour la prévention du recrutement des filles âgées de moins de 18 ans dans les travaux domestique

 

En se référant aux dispositions de la convention n° 182 sur les pires formes de travail des enfants, l’UNICEF considère que la plupart des critères des “ pires formes ” de travail des enfants s’appliquent au cas des enfants domestiques : les petites filles sont parfois sujettes à des pratiques « telles que la vente et la traite des enfants, la servitude pour dettes et le servage ainsi que le travail forcé ou obligatoire, y compris le recrutement forcé ». Le travail domestique expose les enfants à l’exécution de travaux qui, « par leur nature ou les conditions dans lesquelles ils s’exercent, sont susceptibles de nuire à la santé, à la sécurité ou à la moralité de l’enfant » ou à des « travaux qui s’effectuent dans des conditions particulièrement difficiles, pendant de longues heures ou la nuit, ou pour lesquels l’enfant est retenu de manière injustifiée dans les locaux de l’employeur »

Dans l’article 32, la Convention des droits de l’enfant interpelle les Etats parties à reconnaitre « le droit de l’enfant d’être protégé contre l’exploitation économique et de n’être astreint à aucun travail comportant des risques ou susceptible de compromettre son éducation ou de nuire à sa santé ou à son développement physique, mental, spirituel, moral ou social, et à prendre les mesures législatives, administratives, sociales et éducatives pour assurer l’application dudit- article »

Le travail des enfants est une violation des droits des enfants, le prix pour la réalisation de ces droits ne doit pas être payé par les enfants eux-mêmes, en hypothéquant leur futur et en sacrifiant leurs corps et âmes. Les études montrent que l’impact du travail des enfants dépasse largement l’atteinte aux droits de l’enfant d’être protégé contre les différentes formes d’exploitation, il influe sur l’économie nationale en termes de baisses de compétitivité, de productivité et de revenus potentiels, perpètre les inégalités et la pauvreté intergénérationnelle et empêche les enfants à acquérir les compétences et l’éducation nécessaires pour améliorer leur avenir

Le travail des enfants est à la fois une cause et une conséquence de la pauvreté.Ces causes les plus visibles sont

La défaillance du système éducatif et le manque d’accès à l’éducation pour les filles notamment dans le monde rural

Le manque de formation professionnelle adaptée au profil de l’enfant

La pauvreté de la famille et de l’enfant

Le statut social de la fille et de la femme

Les comportements sociaux qui font que le travail des enfants est perçu comme une forme d’apprentissage et de préparation à l’âge adultes, y compris le mariage

L’UNICEF interpelle l’ensemble des détenteurs d’obligation à considérer que l’abolition effective du travail des enfants est une nécessité morale qui doit être respectée, promue et réalisée

Il n’existe pas de politique unique en soi, capable de mettre fin à l’exploitation des enfants par le travail. L’élimination du travail des enfants doit être intégrée dans le cadre des politiques nationales et régionales abordant simultanément les actions suivantes

Adopter et appliquer une législation nationale interdisant le travail des enfants sans exception, et s’assurer que l’information sur la législation est largement diffusée auprès des parents et des employeurs

Accélérer la mise en place des dispositifs territoriaux de protection de l’enfance comme indiqué dans le plan de mise en œuvre de la politique intégrée de protection de l’enfance

Renforcer le dispositif d’application de la législation et de l’exécution des sanctions appropriées. Une attention particulière doit être accordée au renforcement de l’inspection du travail et la mise en place de procédures de signalement

Assurer l’accessibilité aux services publics : Accès à l’éducation obligatoire, gratuite et de qualité, la formation professionnelle et les services de protection sociale

Adopter les stratégies pour encourager la rétention scolaire, aider les familles pauvres à réduire les coûts de l’éducation, la création d’un apprentissage adapté à l’environnement des enfants et l’assurance d’un environnement protecteurs des enfants, notamment dans les écoles

Prévoir des mécanismes concrets pour répondre aux besoins des enfants retirés du travail et soutenir leur réinsertion scolaire ou dans une formation professionnelle appropriée

Renforcer les programmes de lutte contre la pauvreté, soutenir les familles à protéger leurs enfants en œuvrant pour la mise en place de système de protection sociale par le biais de transfert de fonds, le renforcement et la mise en œuvre des politiques de protection

Mesdames et messieurs les journalistes

Ce combat contre le recrutement des enfants en tant que domestiques ne pourra pas aboutir sans votre engagement quotidien. Permettez moi d’adresser les remerciements de l’UNICEF à chaque journaliste qui accompagne ce combat et s’investit pour changer cette situation

Mesdames et messieurs, Chaque enfant compte

Chokran

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